Julien Pincemin, coach du RBF : « sur le terrain on met des costumes de super-héros on a un club à défendre »

Basket, Interviews — par Fabien Moretto, le 13 août 2019 (10:41)

Crédit photo : Elodie SAINTE

L’heure de la reprise approche pour le RBF, c’était l’occasion d’échanger un peu avec Julien Pincemin, fraîchement débarqué sur un banc rémois totalement renouvelé. Un entretien à bâtons rompus avec un coach ambitieux à l’aube d’une saison qui ouvre un nouveau cycle pour le club.

Hâte de reprendre ?

On a tous hâte de reprendre parce que la trêve est trop longue à mon goût. C’est quasiment 4 ou 5 mois sans basket, donc même s’il y a toujours beaucoup de choses à peaufiner et à faire, je pense que là on est tous en train de tourner en rond. En tout cas moi je tourne en rond et je pense que les joueuses aussi. On a tous hâte de reprendre et de repartir dans l’intensité de la saison. Ça manque le basket. Donc prêt à reprendre et prêt à reprendre parce que c’est à Reims bien sûr.

Justement, le choix de Reims, c’est un retour aux sources…

C’est un tout. J’ai découvert le basket féminin à l’époque de Saint Jacques, entraîné par le président, Philippe Sauret. C’est un club que je connais depuis longtemps, que je suis et que j’apprécie. Je connais son environnement, ce qui se passe autour. C’est toujours positif de venir dans un club qu’on connait, avec des personnes qu’on a déjà côtoyées. Je connais l’état d’esprit du club, la volonté du président donc au delà du rapprochement, de l’aspect familial, de revenir dans la ville ou j’ai démarré le basket de haut niveau (assistant et préparateur physique au Reims Champagne Basket durant quelques années), il y a aussi le projet sportif qui m’a convaincu. Je sais que c’est un club qui est stable et qui a de l’ambition. C’est un projet qui me plaît, dans lequel je crois. Le club est en train de repartir sur une nouvelle structure pour se donner toutes les armes pour monter.

Donc au niveau des ambitions c’est la remontée dès cette année ?

Les ambitions, c’est déjà de jouer les premiers rôles. Après on ne va pas se cacher, si on peut monter on va monter. Maintenant il faut aussi être réaliste, le championnat de Ligue 2, d’années en années, devient de plus en plus compliqué. Aujourd’hui il y a quand même trois budgets qui sont au dessus de tout le monde, mais on a de l’ambition. On a fait une équipe avec des joueuses ambitieuses, le club est ambitieux, je suis ambitieux donc si on ne va pas crier haut et fort qu’on veut monter, on va essayer d’aller chercher le haut du classement. On sait qu’on a une saison qui va être compliquée pour deux raisons, déjà on a renouvelé 100% des joueuses. Il va falloir que tout cela prenne forme avec deux étrangères qui n’ont jamais connu le championnat de France. Ensuite on a un calendrier qui est compliqué d’entrée, ça peut nous mettre sur de bons rails, ça peut bien nous lancer comme ça peut nous mettre dans le doute. On doit être prêt pour le premier match, on ne pourra pas se regarder (le RBF affronte Angers, favori cette saison).

Sur le recrutement comment avez-vous travaillé avec le président ?

On a travaillé ensemble. On a une vision du basket commune, ce qui a créé des liens, ça a tout de suite matché entre nous. Quand je lui ai exposé ma façon de jouer et le profil de joueuses que je voulais, il s’y est retrouvé et on a réussi à valider toutes les joueuses ensemble. C’est quelque chose dont j’avais envie et le choix de Reims c’est aussi pour apprendre de Philippe Sauret, un entraîneur qui a de l’expérience et qui a fait ses preuves dans le basket féminin. Pour moi, jeune coach, ça va me permettre d’avancer dans plein de domaines. Donc on a recruté ensemble sur une équipe où il a fallu tout recomposer de A à Z.

C’était un choix délibéré ?

C’était un choix du président qui voulait tourner complètement la page. Moi je n’étais pas contre. Il n’y avait que Diana Balayera qui était sous contrat, c’est une joueuse que j’ai eu quatre ans au centre de formation donc ce n’est pas un souci pour moi. On a d’abord voulu construire une équipe sur un état d’esprit, des valeurs humaines. C’est facile de trouver une joueuse qui passe, qui tire, qui fait des choses techniques mais ce que je voulais avant tout c’est une équipe qui est capable de véhiculer une énergie, un enthousiasme et du plaisir dans un objectif commun. Pour moi le basket ce n’est pas seulement des joueuses et des qualités techniques et tactiques qu’on associe, ce sont aussi des personnes. Donc ma philosophie première c’est de construire une équipe qui va vouloir défendre les couleurs du club, vouloir se battre tous les jours à l’entraînement, vouloir travailler sans se donner de limite. C’est ce que je voulais, au delà de regarder la joueuse de basket, j’ai pris beaucoup d’infos, beaucoup de renseignements pour aussi choisir des joueuses sur leur état d’esprit. Sur les Françaises c’était facile, sur les sept recrutées j’en ai déjà coachées quatre. Ensuite on a pris deux joueuses de Charnay avec un état d’esprit exemplaire et qui ont connu la montée. Sur les deux étrangères, au delà du basket, j’ai beaucoup discuté, beaucoup cherché sur ce qu’elles dégageaient, leur envie et j’espère qu’on ne s’est pas trompé.

Dernièrement vous avez salué vos anciennes joueuses de Nice qui n’avaient pas lâché malgré les difficultés, c’est ce que vous recherchez ?

Oui, je suis très exigeant. Je prends plaisir à ce que je fais, en dehors du terrain je suis le premier à rigoler, en revanche sur le terrain j’ai une exigence extrême, j’attends certaines choses qui, arrivé à ce niveau là, ne doivent pas venir de moi. L’exigence de travail, la concentration, l’intensité doivent venir d’elles. C’est la première chose que j’avais instauré à Nice. Je veux leur faire comprendre que c’est leur projet, elles sont là pour défendre leurs valeurs, aussi pour avancer dans leurs carrières, parce qu’elle vont peut-être faire un an, deux ans, trois ans à Reims et après ça va continuer et moi je suis là pour leur apporter un truc en plus qui va leur permettre d’avancer. C’est l’état d’esprit qu’on a eu à Nice et malgré le fait qu’on ait fait une saison pour du beurre. Je pense qu’on a montré des choses, qu’on a prouvé des choses, elles ont toutes évolué et pour preuve elles ont quasiment toutes trouvé un meilleur contrat. C’est ce que je voulais pour Reims. Des jeunes qui travaillent… Jai pris des moins de 23 ans que je connais très bien, qui vont travailler, qui vont être exigeantes, qui vont pousser l’équipe vers le haut et je pense qu’il y aura de vraies surprises parmi elles. Les cadres sont des joueuses connues dans ce championnat avec un état d’esprit exemplaire et les joueuses étrangères vont vouloir montrer qu’elles sont capables d’évoluer dans ce championnat et pourquoi pas monter d’une division. C’est ce que je cherchais, je veux qu’elles s’imposent un niveau d’exigence au dessus du mien. Et il faut de l’enthousiasme, quand on est à l’extérieur du terrain, on doit prendre du plaisir à se dire qu’on fait du basket, qu’on est dans une super ville avec des choses à découvrir, on peut parler d’autre chose. En revanche quand on est sur le terrain, on devient une autre personne on met des costumes de super-héros et on travail parce qu’on a un club à défendre et des bénévoles, des dirigeants qui s’investissent autour de nous et nous notre seul travail c’est de faire du basket. Ça doit être fait avec beaucoup d’enthousiasme et il doit y avoir un équilibre entre l’exigence et le plaisir. Il y a des jours où ça me fait chier d’aller à l’entraînement, des jours où je n’ai pas envie mais une fois sur le terrain, quelqu’un qui souffle ou qui n’a pas envie, je ne comprends pas. On a la chance de faire ça, j’ai deux frères qui bossent à l’usine, qu’ils soufflent en partant au boulot le matin je comprends. Nous on fait du basket pro, on gagne de l’argent, on est bien, Reims est un club qui est structuré, on doit avoir un retour positif sur tous les gens qui viennent nous voir, bénévoles, spectateurs, journalistes…

Vous avez un passé de formateur, est-ce que développer la formation au RBF fait partie de vos missions ?

Le président m’a choisi aussi parce qu’à Nice j’avais réussi à faire jouer les jeunes, à les développer. Ce côté formateur est intéressant, notamment quand on a pas un budget mirobolant, pouvoir faire jouer des jeunes joueuses et les développer. C’est ce que je veux, aujourd’hui on est la seule équipe en Ligue 2 à avoir cinq moins de 23 ans. C’est pas forcément une question de budget, c’est un vrai choix, certaines joueuses vont avoir de grosses responsabilités à peine sorties du centre de formation, des responsabilités qu’elles n’auraient peut-être pas eu dans d’autres clubs. Je l’ai fait et ça a été ma marque de fabrique à Nice, même si là bas je n’avais pas le choix. Là c’est un choix. Après je n’aurai pas la main sur le centre de formation, il faut que les gens en place développent leur propres idées, en revanche je serai évidemment attentif à ce qu’il se fait et je serai le premier à les aider s’ils ont besoin d’aide. A l’image de ce que j’ai pu faire à Charleville, je peux apporter mon expérience.

Quel est le programme pour la reprise ?

On reprend le 26 août, on a neuf matchs amicaux de prévus, sept semaines de préparation avant le premier match. On va avoir une préparation qui va être particulière parce qu’on a trois joueuses qui vont partir en équipe de France de 3×3, donc des joueuses absentes ce qui va perturber un peu la préparation mais c’est important pour elles. Donc premier entrainement le 26 à 17h à René Tys, premier match le 7 septembre à Sainte-Savine et le lendemain on reçoit Namur à Reims. Ensuite on joue quasiment deux matchs par semaine hormis la semaine de Coupe de France. C’est une volonté d’avoir beaucoup d’amicaux pour que l’effectif joue, on a besoin de monter en puissance et le premier match c’est Angers, on pouvait difficilement faire pire pour démarrer.