Elodie, rémoise à Madagascar : « La CAN, c’était incroyable »
Interviews, Magazine, News — par Fabien Moretto, le 23 juillet 2019 (0:16)
Au sortir d’une Coupe d’Afrique des Nations qui a vu triompher l’Algérie de Aïssa Mandi, nous avons eu envie d’évoquer l’autre sensation de la compétition, le Madagascar de Thomas Fontaine et Romain Métanire, auteur d’un parcours incroyable jusqu’en quart de final (0-3 face à la Tunisie). Nous avons contacté Elodie, globe-trotteuse rémoise expatriée à Diego-Suarez depuis un an et demi, l’occasion de vivre avec passion et intensité la CAN réalisée par les Malgaches. Elle nous raconte.
Tu es basée à Diego Suarez, c’est dans quel coin de l’île de Madagascar ?
Sur la pointe Nord de Madagascar, dans la région Diana. On ne peut pas faire plus au Nord ! Ce n’est pas très loin de Nosy Be qui est l’île la plus touristique de Madagascar, je dis pas très loin… mais c’est à huit heures de route en taxi-brousse !
Tu comptes en temps, pas en distance ?
Avec l’état des routes ça ne sert à rien de compter en kilomètres, on peut mettre une heure pour faire vingt kilomètres ici, surtout en saison des pluies.
Tu y fais quoi ?
Je suis chargée de communication pour une ONG qui s’appelle Cœur et Conscience. Notre mission est de permettre l’accès à l’éducation des enfants les plus démunis de Diego-Suarez grâce au parrainage. Ils bénéficient également de tous les soins médicaux nécessaires puisque nous disposons aussi d’un cabinet médical et dentaire.
Tu as donc pu vivre la CAN de l’intérieur, avec un parcours fantastiques des Zébus, comment as-tu vécu ce moment ?
C’était incroyable ! Je crois même avoir ressenti plus d’émotions qu’en 98 tellement l’ambiance était folle. Je parle de 98 car j’étais déjà à Mada pour celle de 2018, je n’ai donc pas vécu la liesse en France. C’est bien connu, les Malgaches aiment la fête, l’ambiance. C’est dans leur culture. Donc si leur équipe gagne c’est la folie dans tout le pays ! C’était impressionnant car on sentait vraiment que tout le pays (même si je n’ai vu que Diego) était derrière son équipe, sans exception. Le jour du premier match, j’ai vu des enfants qui fabriquaient à la hâte des maillots aux couleurs des Barea, des jeunes filles se peindre les ongles aux couleurs du drapeau malgache. Lorsque qu’ils se sont qualifiés, c’était la folie dans les rues de Diego. Les voitures, les 4×4, les camionnettes, les pousse-pousses ont défilé dans la ville en klaxonnant. Les gens criaient, chantaient, tapaient avec des couvercles de marmites en acier. Le jour des quarts de finale les gens ne parlaient que de ça dès l’aube. Quand les gens se demandaient « Quoi de neuf ? » (« Ino vaovao ? » en malgache) les gens se répondaient « Alefa Barea ! » le slogan de l’équipe.
Comment tu traduis Alefa Barea ?
« Allez les Barea !» tout simplement. Encore aujourd’hui ce slogan est dans toutes les bouches et s’affiche sur de nombreux tee-shirts ou photos de profil Facebook !
(le barea est une race de zébus parmi les plus majestueux et les plus forts de Madagascar, NDLR bien aidée par Elodie)
Les matchs étaient l’occasion de se réunir ?
Oui, à Mada beaucoup de choses se font collectivement et puis tout le monde n’a pas la télé. Il y avait un écran géant devant l’hôtel de ville et la plupart des bars retransmettaient les matchs. Sinon les Malgaches s’organisaient pour le regarder chez un voisin. À la mi-temps, le son de la télé laissait place aux chansons créées spécialement pour soutenir les Barea. Il y en a une vingtaine sur Youtube au total !
Des chansons improvisées sur le moment ?
Non, faites par les stars de la chanson du moment : Basta Lion, Dalvis, Tence Mena… Ici on fait des chansons pour tout, le nouvel an, les élections… La musique est ancrée dans la culture malgache.
Il y a moins de retenue, plus de convivialité que ce que tu as pu connaître en France ?
Clairement ! Imagine, c’est historique ce qui s’est passé pour eux. C’est la première fois qu’ils participent à la CAN. Ils étaient le petit poucet de la compétition. Ils n’ont perdu aucun match (à part le dernier) et ils ont même fini premiers de leur groupe ! Quand ils se sont qualifiés pour les quarts tout le monde courrait dans la rue et chantait. Tout le monde se sautait dans les bras des uns des autres. On m’a même remerciée parce que je portais un t-shirt aux couleurs des Barea !
Il n’y a pas eu trop de déception après l’élimination ?
Tout le monde était déçu bien sûr. Le dernier but de la Tunisie a été très mal vécu. Les malgaches auraient voulu que l’aventure continue, que l’équipe continue à nous faire rêver comme elle l’a fait. Mais la joie a tout de même primé et ça ne les pas empêché de faire la fête à l’issue du match. Il y a même des véhicules qui ont défilé a l’issue du match. Fair play les malgaches ! Ils sont tellement fiers de leur équipe (« nouvelle génération » comme ils disent) et de son parcours. Ils ont écrit l’histoire. Grâce aux Barea, le monde entier a entendu parler de Madagascar.
En Afrique (et pas uniquement) le foot est souvent teinté de politique suivant les contexte des pays (facteur d’unité en Côte d’Ivoire, symbole d’indépendance et liberté en Algérie,…), il y a eu une connotation équivalente à Mada ou c’était simplement un grand moment de joie collective ?
Je l’ai plutôt ressenti comme un grand moment de joie collective, dénuée de connotation politique. Même si les Malgaches étaient reconnaissants envers leur président d’avoir affrété trois avions de supporters (un pour les huitième et deux pour les quarts). Là on ressentait surtout une vraie reconnaissance envers l’entraîneur Nicolas Dupuis. Je pense qu’il a un vrai fan club à Mada désormais.
C’est un sport national comme ça peut l’être en France ?
On le sait tous, les Malgaches excellent plutôt dans la pétanque. Mais le foot reste le sport le plus populaire. Je le vois avec les enfants que nous accompagnons à l’association. Ils sont nombreux, garçons ou fille, à jouer au foot pendant leur temps libre et parfois avec des ballons qu’ils ont fabriqués eux mêmes.
ça fait cliché mais pour jouer c’est du sytème D ? Pas beaucoup de moyens ou de structures pour accompagner la pratique ?
C’est cliché mais c’est une réalité… Hier encore à Tana, la capitale, j’ai croisé des enfants avec un ballon fait de bric et de broc. Il y a un manque de structures et de moyens évident. C’est sans doute pour ça qu’il est si difficile pour les athlètes malgaches de se faire une place parmi les grandes nations du sport. Madagascar fait partie des 10 pays les plus pauvres du monde, mais c’est aussi le pays de la débrouille, de l’optimisme et de la détermination. Et c’est pour ça qu’on peut assister à des petits miracles comme à la CAN cette année.
Tu me parlais de pétanque, quels sont les autres sports populaires ?
Au nord de Madagascar l’autre sport populaire c’est le morengy (prononcer « moringue »), c’est la boxe malgache. C’est assez spectaculaire à regarder (même si les combats sont très courts) car les adversaires sont libres d’utiliser leurs mains et leurs pieds. Les matchs ont lieu le dimanche après midi en plein air. La veille du match, les combattants défilent dans des pick-ups dans les rues de la ville pour faire la promotion du match.
Merci beaucoup à Elodie pour sa disponibilité et les photographies sur place, si vous voulez découvrir le travail de Cœur et Conscience :
Le site internet
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