Gloria Agblemagnon : « Par le sport, je veux montrer que tout est possible »

Athlétisme — par Julien Lampin, le 5 janvier 2021 (16:28)

Crédit photo : FFSA

Chaque lundi, l’équipe de Sport Club invite un acteur du sport rémois à l’antenne de RJR dans l’émission « Sport Club, le talk ». Pour cette première de l’année, Gloria Agblemagnon s’est livrée sur ses ambitions, son année 2020, le sport adapté… Echanges avec la licenciée du SLAC Saran et du Creps de Reims.

On vient de finir une année perturbée par la crise sanitaire, comment tu l’as vécu et est-ce que ça t’as perturbé en vue des Jeux de Tokyo ?

Sur le 1er confinement, ca a été compliqué parce je faisais une heure chez moi et une heure en extérieur. Or pour lancer plus loin, je dois travailler ma masse musculaire. Et sans matériel pour travailler chez mois, j’ai beaucoup perdu et je lançais moins là. Là ca va mieux. Le 2e confinement on avait anticipé, le couvre-feu aussi.

Tu es sélectionnée pour les Jeux Paralympiques à Tokyo, comment tu t’y prépares ?

Mon objectif c’est le podium, et si possible l’or. Je sais que ce sera dur parce que les Ukrainiennes et une Anglaise sont très forte. Je vais pas lâcher l’entraînement pour y arriver. Il fallait être dans les 4 premiers lors des derniers championnats du Monde, et j’avais fini 3e, du coup je suis contente, et oui, je continue de me préparer. Il y aura des championnats d’Europe, j’espère les championnats de France FFA en outdoor cet été, et j’espère qu’il y aura d’autres compétitions. C’est un vrai bonheur, parce qu’en 2020, j’ai du faire 3 compétitions. Les entraînements, c’est bien, mais il y a rien de mieux que la compétition.

Tu connais tes dates de compétition pour les Jeux Paralympiques ?

Je sais juste que ce sera du 24 août au 5 septembre, mais je ne connais pas encore le jour exact de mon entrée en compétition.

Pour revenir à tes débuts, Gloria, tu avais pratiqué d’autres disciplines avant l’athlé ?

Mon premier sport, c’était le tennis, mais j’étais nulle. La balle partait partout, je me suis dis c’est pas pour moi (rires). Ensuite, j’ai fait un peu d’équitation dans un centre. Ensuite, j’ai tenté le basket à Orléans, mais pareil, j’étais trop nulle. C’était ma grande soeur qui en faisait. J’ai essayé, mais j’était nulle. Et comme le gymnase était juste à côté de la piste d’athlé, je me suis tourné vers l’athlétisme donc pourquoi pas essayer.

Et pourquoi les lancers ?

Ce qui me plaît, c’est que j’ai l’impression d’être ailleurs. Ca me détend, une sorte d’échappatoire.

Et à quel moment tu as intégré la fédération de sport adapté ?

En 2014, j’avais 16 ans, mon coach s’était renseigné ou des personnes du sport adapté c’était tourné vers lui. Il m’avait parlé du sport adapté, que je pouvais y faire une belle carrière. Donc je suis partie au Creps, j’y ai eu des entretiens, des tests. Et j’ai intégré le pôle France sport adapté. Avant je savais que j’avais un handicap, mais je n’avais jamais imaginé pouvoir intégrer cette fédération. Mais même ma toute première question, voire même encore aujourd’hui, je ne pense pas à mon handicap.

Tu parles de tests, il s’agit de quoi ?

Pour les Global Games, par exemple, on avait des tests de mémoire, de rapidité, de motricité.. Et si on a plus de 70, on ne peut pas accéder aux compétitions Global Games. Pour cette compétition, on fait les tests tous les 4 ans avant la compétition.

Tu regrettes le manque de médiatisation du sport adapté ?

Oui, un peu, et notamment la difficulté du coup de ne pas toucher les personnes qui pourraient pratiquer en sport adapté. Les médias ont leur rôle à jouer. Pour ma part, dans mon quotidien, avec mon handicap, je sais par exemple que j’ai besoin de plus de temps pour travailler en cours. Mais le sport, il permet de montrer que dans la vie, on peut réussir, et il faut le montrer aux personnes concernées par le handicap. En ce qui me concerne, quand on me pose des questions sur mon handicap, ça ne me pose aucun problème, donc on peut en parler. En revanche, quand on parle de handicap, on pense toujours au physique. Donc quand je leur dis que j’ai une déficience intellectuelle, la phrase qui vient toujours en premier, c’est « ha mais ça ne se voit pas ! ».

 » Quand je leur dis que j’ai une déficience intellectuelle, la phrase qui revient toujours c’est : « Ha mais ça ne se voit pas » !

Pour toi, est-ce que l’émergence du sport adapté peut permettre à un jeune qui souffre d’un handicap d’en faire une force ?

Oui, je pense. Avec la région Centre, j’interviens dans des collèges pour expliquer mon parcours. Et mon but c’est de leur montrer que c’est pas le handicap qui va nous arrêter. Par exemple, quand j’étais plus jeune, je rêvais d’être astronaute et on m’a toujours dit, c’est pas possible, tu pourras jamais. Donc je me suis orienté vers autre chose. Mais mon objectif, c’est de montrer qu’il faut toujours se battre et rien lâcher. Et par le sport, je peux montrer que tout est possible.

Pour revenir sur ta discipline, comment tu situes le niveau de la France en lancers, quelque soit la fédération ?

Je pense qu’en France on a des bons lanceurs, dans toutes les catégories (valide, handi ou sport adapté). Aujourd’hui, je vois surtout beaucoup de filles qui se mettent au lancer. Ca c’est encourageant, ça montre que les lancers sont accessibles. Les femmes ne sont pas toutes costauds, certaines sont très techniques.

Justement, tu parles de technique, en lancer, elle est importante.

Oui, pour moi, la rotation, j’ai mis du temps à l’apprendre. Il faut des années pour la maîtriser. Je sais qu’aux Etats-Unis, ils ont une manière de lancer. J’essaye de la travailler avec mon coach, et je vois que c’est pas facile, ce sont des heures de travail.

C’est un travail routinier ?

C’est pas ennuyant. C’est vrai que je répète beaucoup les mêmes gestes mais comme ça ca rentre bien dans mon crâne (rires). Après je fais beaucoup de mimes pour que le geste soit automatique quand je fais vraiment le lancer.