Rétro – Il y a 10 ans, Eliran Atar, l’attaquant le plus cher du Stade de Reims

Articles, Football — par Julien Lampin, le 14 août 2023 (14:31)

Crédit photo : Grégory Jajko

Les temps ont bien changé. Le Stade de Reims vient de réaliser le mercato estival le plus cher de son histoire, achevé par son plus gros achat, Mohamed Daramy, à plus de 10 millions d’euros. Il y a seulement 10 ans, l’Israélien Eliran Atar s’engageait à Reims, pour 1,3 millions d’euros. C’était à l’époque une dépense record. Un décalage contextuel à tout point de vue.

Les décennies passent, les années défilent, les époques changent, mais pas l’espoir que suscite un mercato estival à l’aube d’une nouvelle saison. Souvenez-vous, il y a 10 ans, à l’été 2013. A l’époque, le Stade de Reims vient de se maintenir dans l’Elite, après 33 ans d’absence. L’enthousiasme existe. Sous la houlette d’Hubert Fournier, le club rémois veut monter une équipe qui doit permettre de se maintenir plus aisément. Exit Nicolas Fauvergue dont la venue fut un échec, adieu également Kamel Ghilas, Johann Ramaré, Alexi Peuget ou Antoine Conte. A l’époque, le club évoquait là aussi un tournant dans son projet. Pour s’installer au plus haut niveau sans trop souffrir, il fallait recruter des joueurs d’expérience et à potentiel, déjà, et avec une autre culture pour apporter une plus-value footballistique au groupe.

Côté français, le Stade de Reims accueille Prince Oniangué, alors à Tours, et surtout Gaëtan Charbonnier, en échec à Montpellier. Une arrivée qui avait fait grand bruit. Avec une cellule de recrutement bien moins développée qu’aujourd’hui (Alexandre Barbier découvrait le job), le club marnais tente aussi des coups avec le Turc Atila Turan et le Danois Mads Albaek, convaincu de la plus-value qu’ils pourraient apporter. Mais la hype de l’été 2013 s’appelle Eliran Atar, international israélien et meilleur buteur de son championnat avec le Maccabi Tel-Aviv. La signature de cet attaquant expérimenté de 26 ans, présentée comme une star dans son pays, est annoncée comme le gros coup de l’été à Reims. D’autant qu’il a couté cher : 1,3 millions d’euros. C’est alors le joueur le plus cher de l’histoire du club !

Des espoirs puis désespoir

La présentation est réalisée en grande pompe dans les pré-fabriqués du centre d’entraînement au quartier Europe. L’ambition de la nouvelle recrue est grande, autant que les attentes des supporters. Loin des réseaux sociaux encore balbutiants, les discussions s’enflamment sur les forums de fans. Comme Mohamed Daramy, c’est un offensif polyvalent qui joue plutôt à gauche. Les débuts confirment l’enthousiasme. Malgré une défaite initiale à Rennes, les Rémois dominent Lille grâce à un but de Mad Albaek sur une passe décisive… d’Eliran Atar. Le moment est parfaitement choisi pour louer la qualité du recrutement. Finalement, la déception sera toute aussi grande. En 24 apparitions et 1039 minutes en Ligue 1, Eliran Atar aura apporté 2 buts et une passe décisive.

L’occasion de relativiser la nouvelle ferveur qui anime Reims dix ans plus tard ? Pas forcément, tant le contexte, à 10 ans d’écart, n’est plus comparable. Le président Jean-Pierre Caillot l’a reconnu lui-même quelques années après cet été 2013, le club est allé trop vite. D’abord parce que la méthode de recrutement était à des années lumière de l’organisation actuelle. A l’époque, seul Alexandre Barbier tentait de regarder à l’étranger, et le club passait par un relais (Franck Belhassen bien souvent) qui gérait avec les agents sur place. Un méthode limitée désormais oubliée.

Les moyens dont disposent Reims en 2023 ne sont pas non plus comparables. En 2013, le Stade de Reims n’avait pas encore son centre de vie (alors en construction) et évoluait sur des installations sommaires aux Thiolettes. Des structures non adaptées à l’intégration de joueurs étrangers à la culture et au mode de vie bien différents de la France. D’autant que les moyens humains n’étaient pas non plus suffisants. En 2013, Eliran Atar, aussi starifié soit-il, était arrivé seul en France, sans accompagnement du club. Difficile pour un épanouissement total sur le terrain. « Nous en étions au balbutiement de notre cellule de recrutement. Nous regardions à l’étranger avec un amateurisme total, reconnaît Jean-Pierre Caillot. A l’époque, on se disait qu’on payait cher un joueur, donc il devait être bon. Sans imaginer tout le travail d’accompagnement hors terrain que cela nécessitait. Ce sont des hommes avant d’être des joueurs. Et justement, notre erreur, ca a aussi été de recruter des joueurs sur des qualités footballistiques sans regarder leur mentalité. Hors l’état d’esprit, c’est primordial quand l’équipe traverse des moments difficiles ».

Depuis, le club rémois semble avoir appris. Avec des structures reconnues, une stratégie de recrutement travaillée, le Stade de Reims a réalisé plusieurs opérations qui lui ont permis de grandir financièrement, structurellement et sportivement. Au point désormais de dépenser plus de 40 millions d’euros en un été. Cette fois, les cibles et les investissements, bien qu’importants, semblent moins risqués. Mais dans le sport, la garantie n’existe pas…