Grégoire Lefebvre : « Un gros turn-over n’est peut-être pas une mauvaise nouvelle »

Basket — par Julien Lampin, le 8 mai 2020 (13:21)

Crédit photo : CCRB

A l’arrêt depuis début mars, la Jeep Elite de basket reste dans l’incertitude. Une difficulté de plus pour Grégoire Lefebvre, arrivé aux affaires au CCRB cet hiver, au moment où la crise pointait le bout de son nez. Identité, finances, sportif, le nouveau directeur général du club a accepté de faire un point de situation. Entretien…

Grégoire, vous êtes arrivé dans la Marne il y a quelques mois, avec certainement des idées et des projets à mettre en place, sans imaginer une telle crise, quel est votre état d’esprit à ce sujet ?

En tout cas, ca reste une période qui est très chargée pour l’ensemble des dirigeants du club pour pouvoir se projeter sur la suite. C’est sûr que cette crise change un peu le référentiel que j’avais en arrivant et ce qu’attendent les dirigeants de mon arrivée. Mais j’ai tendance à penser que de cette crise, on doit faire émerger des idées et peut-être même que celles qu’on avait avant cette crise sont finalement vouées à se mettre en place plus rapidement. Tout n’est évidemment pas possible à mettre en place tel qu’on l’imaginait mais il y a des choses qu’on pourra, j’espère, mettre en place rapidement. On reste dans un état d’esprit plutôt conquérant malgré les incertitudes.

Quels étaient les forces et les faiblesses du club selon vous, avant la crise ?

Parmi les forces, c’est un club en bonne santé, et qui a été très bien géré depuis son appellation CCRB, avec une structure saine, un engagement des dirigeants et de l’équipe qui est remarquable, avec une vraie passion pour le club. Ses faiblesses, je dirais sa jeunesse dans l’Elite avec encore une histoire à continuer d’écrire, une empreinte sur le territoire qui mérite d’être accentuée et c’est là-dessus qu’il est nécessaire de travailler rapidement, c’est la question du rayonnement du club sur le territoire, notamment auprès du grand public. On doit fédérer encore plus de monde autour de l’identité du club. Je salue les supporters qui nous soutiennent à chaque match, mais on doit travailler cette attractivité. Avec cette crise, on doit adapter nos projets. Mais d’une manière ou d’une autre, le basket va reprendre, et le CCRB en fera partie. Du coup, ça ne nous freine pas dans nos développements. On peut par exemple travailler sur la communication, sur la façon d’imaginer notre capacité à organiser des événements à l’avenir, que ce soit les soirs de match mais aussi en-dehors. Que le CCRB puisse avoir une vie en-dehors des matchs. Sur tous ces sujets, la crise ne nous empêche pas de travailler.

« Difficile de dire quel scénario sera choisi en AG de la Ligue fin mai. Personnellement, la première solution risque d’être compliquée à mettre en oeuvre vue les incertitudes qui règnent encore sur le côté sanitaire. »

Ca veut dire que le CCRB peut travailler par exemple à la production d’un nouveau site internet ou une nouvelle façon de communiquer ?

Je confirme que le club travaille de manière assidue et c’était déjà le cas avant mon arrivée, sur ces questions de site internet, et de charte graphique. Des arbitrages sont en cours. Mais quand on dit qu’on veut mettre en place des choses rapidement, ces sujets là en sont un exemple, très clairement. Il y a encore du travail mais les choses se précisent. J’espère qu’on pourra faire des annonces d’ici peu sur ces sujets.

En tant que DG, quel est votre rôle au sein du club ? Est-ce qu’il touche autant au sportif qu’au reste ?

Oui, dans le sens où on ne peut pas imaginer un directeur général qui soit totalement dépossédé du sportif, ça n’aurait pas de sens. Je dois avoir une vision globale sur le fonctionnement du club, donc évidemment que j’ai un oeil sur le sportif, mais tout ça se fait en bonne intelligence, et c’est déjà structuré à mon arrivée. Le coach et son staff sont très actifs au sein d’une commission sportive qui regroupe un certain nombre de dirigeants. Cette organisation a trouvé son rythme de croisière, il n’est pas question qu’on le remette en cause. On verra comment les choses évolueront.

Crédit photo : CCRB

Sur la situation sportive, justement, l’incertitude semble régner. Peut-on dire clairement que la saison sportive 2019/2020 est close ?

Aujourd’hui, on ne peut pas le dire. La décision n’a pas encore été prise officiellement au sein de la Ligue. Il n’y a que la LNB qui peut décider. Des scénarios ont été étudiés par des commissions composées de présidents de club, d’experts divers et variés, tant sur l’aspect sportif qu’économique. Pendant longtemps, un scénario avait la primeur de beaucoup. C’était l’idée que la saison actuelle était interrompue mais reprise à la rentrée puis suivie dans la foulée de la suivante. Et puis un autre scénario, plus traditionnel qui consisterai à clore la saison 19/20 dans l’état et reprendre une nouvelle saison de façon assez classique, quelque soit la date de reprise. Difficile de dire quel scénario sera choisi en AG de la Ligue fin mai. Personnellement, la première solution risque d’être compliquée à mettre en oeuvre vue les incertitudes qui règnent encore sur le côté sanitaire.

En ce sens, êtes-vous favorable à une augmentation du nombre de clubs engagés en Jeep Elite sur la prochaine saison ?

Ce serait une bonne chose, notamment pour permettre aux clubs de se reconstruire. Les conséquences économiques seront nombreuses et le CCRB n’y échappera pas. Le championnat à 16, on l’a vu, dans ce qu’il a généré avec la crainte de 3 descentes, tend les clubs sur les questions économiques. Je pense que les clubs ont besoin de sérénité. Donc un championnat à 18, voire à 20 permettrait cette stabilité, quitte à se reposer la question dans quelques saisons.

Justement, quelle est la situation économique du CCRB ?

C’est une tendance globale à laquelle participe le CCRB, tout le basket va se retrouver transformé par cette crise, avec le devoir de revoir son modèle économique, et de façon plus large de savoir ce que sera le basket dans les années à venir. Qu’est-ce qu’il propose ? Quel est son sens dans la société ? La crise précipite ces réflexions, mais ça fait beaucoup de sujets à traiter en même temps. D’un point de vue économique, il est acquis que tous les clubs verront leur budget baisser. On reste dans des projections mais on est de l’ordre de 15 à 35%. Le CCRB travaille ses projections budgétaires parce qu’on ne peut travailler pour l’instant sur des hypothèses. On ne sait pas comment vont se sortir nos partenaires. On leur souhaite, d’abord pour eux et aussi pour nous, que l’impact ne soit pas trop important.

« Hors-crise, je préfère la stabilité, mais dans cette situation d’incertitude économique, on ne le prend pas comme une mauvaise chose. Ca ne veut pas dire qu’on ne se pose pas la question d’une continuité pour certains cadres. »

Beaucoup d’incertitudes sportives aussi. Pour autant, Cédric Heitz reste le coach du CCRB ?

On travaille ensemble sur le recrutement, donc ça devrait donner une réponse.

Le recrutement et le marché sont spécifiques cet été. Se pose forcément la problématique du recrutement des étrangers, notamment US, est-ce que du coup, ça tend le marché JFL ?

La tendance, c’est d’attendre que le marché des joueurs se stabilise à son nouveau niveau, parce que le marché et les salaires devrait baisser. Mais c’est vrai que ça s’agite beaucoup sur le marché français. C’est assez étonnant, parce que du coup on négocie sur des contrats de niveau assez semblable au niveau d’avant-crise. Il y a je pense un phénomène de sécurisation des JFL et d’attente pour les joueurs US pour voir comment les choses évoluent. C’est semble-t-il une stratégie adoptée par beaucoup.

Pour autant, vous avez déjà perdu officiellement Yannis Morin, parti à Strasbourg. Confirmez-vous aussi le départ de Jean-Baptiste Maille ?

Il n’est pas encore signé (jeudi, ndlr), mais les discussions sont largement avancées, c’est vrai. On le sait, le CCRB a cette capacité à mettre en lumière des profils. C’est la valeur ajoutée de ce club. Le choix est fait de donner du temps d’exposition à des joueurs prometteurs et les exemples sont maintenant nombreux où le CCRB a été un booster pour la carrières de joueurs. la contre-partie, c’est qu’on peut aussi regretter leur départ, c’est évident. Mais en l’état, c’est difficile de résister à l’assaut de clubs ambitieux et plus riches. Ca ne veut pas dire qu’on n’est pas ambitieux, mais c’est difficile de contrer le départ de ces joueurs. Et ça fait de toute façon partie du deal avec eux quand ils arrivent. On remercie ceux qui vont nous quitter. De façon générale, on a beaucoup de joueurs en fin de contrat, donc il faut s’attendre à un gros turn-over, et dans la situation actuelle, ce n’est peut-être pas une mauvaise nouvelle. Hors-crise, je préfère la stabilité, mais dans cette situation d’incertitude économique, on ne le prend pas comme une mauvaise chose. Ca ne veut pas dire qu’on ne se pose pas la question d’une continuité pour certains cadres. J’espère apporter des nouvelles prochainement à ce niveau.

Vous pensez à Johann Passave-Ducteil et Jessie Begarin ?

Vous le saurez dès que ce sera officiel. Je n’en dirai pas plus.

Combien de temps faut-il attendre pour les premières annonces ?

Il y a une dead-line importante, c’est l’AG de la LNB qui va décider du scénario à venir pour la prochaine saison. Donc il me semble que cette échéance me paraît être une première bonne étape, pour tous les sujets évoqués dans cet entretien.